Installation et théâtralisation

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Ran8 "Rituel"- Premiers Temps - Gestation -

Installation et théâtralisation

Si le principe de capillarité du papier reste le même, la mise en forme doit pouvoir s’adapter aux différents lieux qui pourraient accueillir ce travail.

Ici, je développe deux possibilités modulables, mais aux déroulés légèrement différents.

La première proposition, très rituelle, dans laquelle la présence des humains est beaucoup plus importante, met en scène les papiers au-dessus de bols et les toutes les actions sont manuelles.

La seconde proposition dite « des bassins » met en espace des cadres de bois de mêmes formats dans lesquels les papiers tremperont. Cette solution permettrait d’une part de construire en série des bassins avec des matériaux locaux et des assemblages particuliers et d’autre part de pouvoir jouer plus loin avec les lumières en les mettant à l’intérieur même des bassins. Les papiers seront actionnés électroniquement via des servomoteurs et contrôlés par un logiciel combiné à la lumière (j’utilise le logiciel Mad Mapper depuis 10 ans).

Les poésies sont bien différentes dans chacune des deux propositions.

Cette installation est aussi pensée comme un « spectacle » avec ses temps forts. Au vernissage une sorte de « cérémonie » durant laquelle les papiers vont changer de position pour finir par être en contact avec l’encre. Puis un long temps, libre, où ils se teinteront par capilarité. Vers la fin du temps d’exposition une « sortie des eaux » des papiers qui sècherons alors suspendus. Enfin le voyage des papiers vers d’autres installations ou comme oeuvres individuelles.

Voici l’idée du déroulement de ces moments:

Le temps de l'entrée

Les gens attendent devant les portes. Un bruit de vent vient de l’intérieur, s’en suit un mouvement sur les carreaux de gampi. Les portes sont ouvertes par deux enfants de 9 ou 10 ans. Les gens entrent dans la pièce. Ils passent à travers deux groupes qui préparent l’encre à genoux sur des tissus. Une douche de lumière invite le public à se poster au centre de la pièce. Les gens s’installent. Une nappe musicale monte peu à peu ainsi qu’une lumière sur eux.

Au départ les papiers descendus du plafond trempent dans l'eau des bols... comme une pluie intérieure.

Le temps de l'immersion

Un violoncelle et une flûte jouent de concert. De bâbord, de tribord. Les lumières jouent et évoluent lentement. Si les oreilles restent à l’attention horizontales les yeux ne cessent de se mouvoir de bas en haut et de haut en bas. Les réseaux de lignes  apparaissent et disparaissent, font naître des ombres mobiles, animées dans toutes les directions de la pièce, striant le bassin d’accueil. Les crins de l’archet, les cordes du violoncelles ont leurs titan. De légers souffles d’air sont là faisant vibrer par transmission l’eau dans les bols. Le plafond par la réflexion de la lumière se voit lui aussi s’animer, devenir un être vivant détaché du reste la pièce, semblant psalmodier quelques incantations à notre égard, à la réussite de la cérémonie et de son but.

La musique marque une pause après une longue tenue de note, presque une nappe sonore qui peu à peu s’estompe et pars hors les murs, dans la forêt.

Le temps que les ondes se stabilisent, le temps que les ombres des fils se fixent un murmure monte de derrière le public. Une activité se fait sentir de plus en plus énergique et contenue.

Le temps de l'émergence

De bâbord et de tribord du bloc des spectateurs arrivent dans une marche parallèle et commune deux groupes; un groupe d’hommes, un groupe de femmes. Ils glissent sur le sol. Bouche ouverte, en silence. Fischhh, fischhhh. Ils se postent de part et d’autre du bloc formant Ran8. Faces à faces. Ils prennent alors chacun une corde et les tirent de concert. Des papiers sortent des bols, se lèvent, flottent dans l’air, gouttent sur le sol et dans les bols. Nouveaux sons, nouveaux reflets nouveaux jeux de reflets. Ils s’immobilisent à distances des côtés du Ran8, maintenant à bout de bras les cordes. On entend les cliquetis. On sent un nouveau bruissement du fond de la salle.

Un second groupe arrive, comme le premier. Ils tiennent de petits flacons, à deux mains, précieusement. Ils versent le contenu de leurs flacons dans les bols. L’eau contenue dans les bols se noircie, par filets contaminants. Les reflets au plafond se troublent et s’agitent tandis qu’à mesure que les nourrisseurs de bols s’éloignent; les teneurs de corde refont descendre les papiers au ras de l’eau en s’approchant des fixations prévues.

En deux colonnes les acteurs complètent le public, de bâbord et de tribord.

Début de la contamination

La note tenue qui s’était échappée de la maison revient. Les papiers commencent à se teinter, par leurs bas à peine plongé dans l’eau noire.

Les papiers trempent dans les bols gorgés d'encre

Dès que les premières réservent se font voir, la lumière passe progressivement de devant à derrière et lentement tout ce que l’on voit n’est plus qu’un contre jour qui a pour effet de laisser fuir à nouveau la musique.
Les sons du sol, les vibrations des bols s’amplifient peu à peu pour les laisser parler une minute dans un noir presque complet.
Les lumières de la salle s’amplifient. Silence.

Ran8 - Second temps -naissance -

Après plusieurs jours d’imprégnations les papiers se couvrent de noir sauf à l’endroit où la graisse à été déposée laissant apparaitre de fantomatiques silhouettes.

Les papier sont devenus "individus"

L’antépénultième jour de l’exposition les papiers se décollent à nouveau du sol lors d’un modeste cérémonial. Les gouttes tombent de la masse des papiers levée. Les bruits qu’elles causent sont amplifiées par les micros, ainsi que les sons venant du jardin, en contre jour. La nuit un éclairage partant de derrière les papiers ne laisse voir que ce qui passe à travers les silhouettes graissées, comme un ciel étoilé. Cet éclairage se modifie le long de la nuit pour venir de devant en passant par les côtés, il suit la course du soleil, de l’autre côté du globe celle que l’on ne voit pas. Les silhouettes s’éteignent peu à peu, les ombres des ficelles tendues envahissent la pièce puis s’évanouissent dans le jardin dont les panneaux qui y donnent accès restent ouverts.

Après deux jours de séchage les bols et les papiers sont prêts.

L’encre figée au fond des bols forme de drôles de prémonitions.

Pendant ces trois derniers jour musiciens, danseurs ou poètes sont invités à jouer avec l’installation, à se filmer ou pas. Des papiers blancs, les mêmes que ceux qui sont suspendus, et des stylos sont à dispositions pour qui veut y laisser un message. (Comme sur Ran7.4)

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